Hépatite C : un générique non autorisé

SANTÉ.

Le laboratoire algérien Beker a mis au point un médicament générique.

Problème : la réglementation interdit la commercialisation en France de ce traitement pourtant 30 fois moins cher que ceux prescrits.


A gauche, le Sovaldi facturé 41 000 € la cure, à droite le générique à 2 000 €. DR
Par Daniel Rosenweg
Le 15 novembre 2016 à 07h00


Vingt-quatre heures ont suffi pour susciter le débat.

Rachid Kerrar, le patron du laboratoire Beker implanté près d’Alger, s’est offert la semaine passée un aller-retour à Paris pour présenter à une poignée de journalistes deux médicaments génériques anti-hépatite C, mis au point par son labo.

Il était accompagné par sa caution scientifique, le professeur Debzi, hépatologue au CHU d’Alger. Ces génériques sont autorisés par les autorités sanitaires algériennes.


Le dirigeant de Beker les présente comme « une des solutions au problème de l’hépatite C en France » où, face au prix des médicaments d’origine, les autorités ont dû rationner leur prescription. Sur les 200 000 personnes infectées par le virus en 2015, seules 15 000 ont bénéficié des produits innovants, moyennant… 900 M€, payés par l’Assurance maladie.


Le Sofos et le Sofosled, les appellations commerciales des deux génériques dont Rachid Kerrar est venu faire la promotion, sont des répliques du Sovaldi et de l’Harvoni.

Réputés efficaces à 95 %, ces derniers sont facturés à la France par l’américain Gilead respectivement 41 000 € et 46000 € la cure.


30 fois moins cher Si le ministère de la Santé ne peut tenir sa promesse de soigner tous les malades, Rachid Kerrar se dit prêt à l’aider grâce à ses génériques vendus… 2 000 € et 3 000 € la cure.

« A deux pas de Paris, Beker propose un traitement générique 30 fois moins cher », insiste le chef d’entreprise, qui se dit sollicité par des Franco-Algériens et des Français.

Message, en passant, aux malades qui peuvent, sous conditions et pour leur seule consommation, rapporter en France des médicaments non autorisés.

« Il faudrait aussi autoriser l’achat en ligne », ajoute-t-il.


Faille juridique


Si l’Inde et l’Egypte sont autorisées par Gilead à « génériquer » ses produits à condition de ne pas les exporter, Beker, lui, profite d’une faille : « L’Algérie ne fait pas partie de l’Organisation mondiale de la santé, rapporte le dirigeant.

Elle n’est pas concernée par les brevets internationaux. Chez nous, il faut déposer un brevet spécifique, Gilead
ne l’a pas fait… » Le niet des autorités de santé françaises Problème, il est impossible pour le laboratoire Beker d’obtenir de la France une autorisation de vente, car d’autres médicaments y sont déjà permis et protégés par des brevets.

Rachid Kerrar suggère de modifier la réglementation.

« Cela demande de l’inventivité et de la volonté, sourit-il avant d’évoquer une participation des mutuelles. Cela se fait ailleurs. »

Mais, pour le ministère de la Santé, il n’y a pas débat. La Direction générale de la santé est catégorique : « Ce qui est proposé est illégal, au regard des règles sur les brevets et sur la distribution des médicaments, car cela ne garantit pas la sécurité et la qualité sanitaire des produits. » Fin du débat. Pour l’instant ?

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